Ni radeau, ni pédalo

Nous voilà dans l’été enfin, à l’heure où plusieurs d’entre nous vont « décrocher » comme on dit, du quotidien professionnel et de l’action militante. Profitez en bien les amis. Dès la rentrée de septembre, l’année politique qui commence (mais s’arrête-t-elle vraiment ?) sera intense et culminera dans l’élection présidentielle d’avril 2017 et les autres scrutins qui suivront. Nous allons passer huit mois (et plus encore) sur le pont et à plein régime. La consigne est donc durant les vacances : Rechargez les batteries et revenez en pleine forme, le cœur vaillant et le moral conquérant ! Être insoumis, c’est aussi une joie de vivre communicative. Et, donnons-nous rendez-vous à notre « Grand pique-nique de la France insoumise », le dimanche 28 août à Toulouse de 11h à 15h. Inscrivez-vous (en cliquant ici), et retrouvons-nous nombreux, notamment pour échanger, mieux s’organiser et aussi écouter un discours de rentrée de Jean-Luc Mélenchon.

Désormais, l’élection présidentielle donne le tempo de toutes choses. Même ceux qui vous disent qu’ils n’y pensent pas sont en réalité obsédés de la chose. Que les Tartuffes cessent de jouer. En Ve République, c’est l’élection phare, et peu de choses sont envisageables ensuite si vous la ratez, à fortiori si vous voulez vraiment mettre à bas la monarchie présidentielle. Méfiez-vous de ceux qui prétendent que les « vrais enjeux » sont ailleurs où qui se plaignent subitement des institutions (qu’ils ne remettent ensuite jamais en cause) pour cibler tous ceux qui veulent y jouer un rôle majeur pour dégager l’équipe sortante et éviter le retour de la droite. Souvent cela masque soit une inconséquence, soit une carabistouille (ou les deux). En écrivant cela, je pense essentiellement à quelques responsables socialistes ou écologistes particulièrement hypocrites. Ces derniers jours, le paysage politique s’est un peu éclairci (et certes, aussi embrouillé). Je dis quelques mots sur l’échec lamentable qui est survenu à l’Assemblée nationale, où 58 députés dits « de gauche » n’ont même pas pu déposer une Motion de Censure pour bloquer la loi El Khomri. 56 valeureux s’étaient regroupés mais au moins deux (très visibles) ont manqué à l’appel. Parmi les absents, tout le monde pense notamment à trois députés PS qui, la semaine précédente (n’est-ce pas M. Galut et Bachelay et Mme Berger ?), appelaient sur les plateaux TV à « la démission de Manuel Valls« . La charge menée au galop s’est transformée en une retraite au Galut. Plus facile de mener la bagarre à BFM TV que dans l’hémicycle. Quelques jours plus tard, sitôt que l’occasion s’est présentée de mettre en adéquation les paroles et les actes, ils se sont dégonflés. Démonstration est donc faite que la lutte efficace contre ce gouvernement ne passe pas par le PS et ses sacs de nœuds. L’explication de mon ami François Cocq est aussi la mienne. C’est la primaire qui les a piégés. Retenons la leçon. J’y reviendrai dans un petit ouvrage à la rentrée. Et puis, que d’inconséquence ! Les « frondeurs » ont-ils une seule fois présenté une solution alternative de gouvernement ? Ont-ils montré une capacité à se rassembler derrière une ou un député pour dire qu’ils le soutiendraient comme potentiel Premier Ministre si ce gouvernement tombait ? Non. Ils ont continué à démontrer une certaine hésitation et confusion qui a fait les affaires de Valls qui lui, sait faire preuve de poigne et ne rate pas les occasions qui se présentent.

Je reviens à la semaine et je commence par ce qui constitue pour moi un évènement et une légère déception. Nicolas Hulot ne sera pas candidat. Sans arrières pensées, je dis que c’est dommage. Il portait haut beaucoup de nos idées. Il élargissait notre surface culturelle. C’est un homme sincère et convaincant, utile dans la bataille idéologique que nous avons à mener pour que cesse le modèle productiviste dans lequel le gouvernement actuel (et ses prédécesseurs) nous enferme. L’urgence écologique est là, majeure, incontournable. Elle doit être portée par le plus de voix possibles. Aucun sectarisme ni esprit de boutique en la matière n’est de mise. Qu’importe si M. Hulot vient du monde de la TV, qu’il a des liens et des amitiés à droite comme à gauche. L’essentiel est ailleurs : il a de l’impact et ce qu’il dit aujourd’hui est juste. Pour faire entendre l’exigence écologique, Nicolas Hulot était un allié précieux à notre action, écouté par des gens qui n’écoutent plus les responsables politiques plus « traditionnels », et aussi qui peuvent être sensible à un vote Modem ou PS. Sa présence aurait donc été utile pour clarifier les enjeux, elle ramenait cet éparpillement vers nos idées. J’espère qu’il jouera malgré tout un rôle important dans la campagne qui vient et je n’oublie pas qu’en 2012, lors de l’élection présidentielle, il avait voté Jean-Luc Mélenchon. Il l’a dit après vote. Le fera-t-il à nouveau en 2017 ? Je l’espère. C’est à nous de le convaincre, en toute loyauté, par la clarté de nos propositions.

Je profite aussi de ce billet de blog pour dire combien je ne comprends pas ce que fait et dit Pierre Laurent, secrétaire national du PCF. Ce que je vais écrire ici n’a rien de personnel, car j’ai de l’estime pour l’homme, intellectuel calme et précis, qui évite, contrairement à d’autres de ses proches, les attaques dégradantes. Mais je ne suis pas d’accord avec lui. D’abord, alors que le peuple va parler en avril prochain, Pierre semble passer son temps à diffuser du pessimisme, et à donner l’impression qu’il craint ce vote en répétant sur LCP ( ou sur d’autres médias) qu’il y aurait en 2017 un « risque d’élimination du PCF ». Commencer ainsi n’est guère enthousiasmant. Cette stratégie de la peur, de plus liée à l’avenir d’un parti, ne mène à rien. Elle démobilise. De plus, alors que nous sommes engagés dans la campagne de Jean-Luc Mélenchon dans le cadre de la France Insoumise, ouverte à tous ceux qui veulent la rejoindre, et qui rencontre un certain succès palpable le 5 juin dernier, Pierre Laurent de son côté, répète qu’il y a un risque d’affaiblissement en raison de la « division » … et ensuite il s’emploie à essayer de fabriquer une candidature supplémentaire, donc à ajouter de la division à la division, en disant de surcroît que la candidature Mélenchon est « une candidature parmi d’autres ». C’est tout ? Ah bon. Comprends qui peut. Le candidat commun de 2012, s’appuyant sur le programme L’humain d’abord, serait-il à mettre sur le même qu’un ex. ministre de Hollande ayant avalé la non renégociation du Traité Sarkozy-Merkel ? Étrange. Quel est le but réellement recherché de ces déclarations à l’emporte-pièce ? L’échec de ce que nous entreprenons avec Jean-Luc Mélenchon ? Triste perspective…

Enfin, alors qu’il semble nous faire reproche de la manière dont nous sommes entrés en campagne, il désigne actuellement 577 candidats PCF dans toutes les circonscriptions, sans concertation aucune, ce qui éclaire tristement la méthode réelle qui semble être la sienne. Le rassemblement… mais derrière le PCF qui en solo décide. Désormais, partout pullule des petits candidats aux législatives, auto-proclamés, dont on ignore ce qu’il propose si ce n’est qu’ils sont candidats du PCF. Pas d’accord. Plus d’accord. Cette stratégie a plombé le Front de gauche. Je l’ai mesuré à Paris en 2014. C’est cela que Jean-Luc Mélenchon a exprimé dans une récente interview de Médiapart. Lisez là. Nous voilà au pied du mur et ce n’est pas de notre fait. Qu’importe, la France Insoumise, dans le cadre rassembleur qui est le sien, s’appuyant sur la dynamique ouverte par la campagne présidentielle, désignera ses candidats partout, en cohérence avec cette campagne.

Car c’est là un autre point important de divergence avec Pierre Laurent et la majorité de la direction actuelle du PCF. En même temps qu’il organise ses désignations « solo », à bien l’écouter, il propose des accords à d’éventuels partenaires (bien hypothétique, lors de diner au curieux menu), dans le cadre des prochaines élections législatives, qu’il dit « plus importante que la présidentielle » (ce sur quoi je pense qu’il a fondamentalement tort, car on ne construit pas l’une sans l’autre), une offre politique à la carte, floue, décousue, au cas par cas, sans visibilité nationale, autour d’un programme minimum, sans engagement pour la suite. C’est un piège mortel. Le prix est de se rendre incompréhensible pour les nôtres. Evitons les brouillages idéologiques, sinon c’est le naufrage électoral assuré. Alors qu’il y a besoin de clarté et de dynamique, d’enthousiasme communicatif, il ne faut pas proposer un « sauve qui peut » craintif, fait d’arrangements ici ou là avec des forces clairement liées au vieux monde, de plus avec des gens souvent confus qui n’ont pas toujours été à nos côtés durant la période qui vient de s’écouler. Disant cela, je dis oui à l’élargissement, mais non au rétrécissement par des stratégies confuses. A l’inverse, parce que nous jugeons dans l’équipe de campagne de Jean-Luc Mélenchon que présidentielle et législatives sont une seule et même élection (c’est à dire qu’elles doivent être en cohérence), nous pensons qu’il faut un même programme, une même identité politique, un même visuel. C’est précisément cela l’originalité de la France Insoumise. D’ores et déjà, des personnalités marquantes de l’histoire et des combats du PCF ont compris cette démarche ouverte et nous soutiennent. Je pense notamment à Marie-George BuffetFrancis Parny ou encore beaucoup d’autres.

L’utilisation du 49 3 par le gouvernement de Manuel Valls, avec l’accord de François Hollande, a durcit le climat social. Mécaniquement, toute idée de Primaire avec le PS est un piège. Une grande majorité de notre peuple veut que cette équipe s’en aille. C’est pourquoi nous profitons de l’été pour lancer la campagne « Je vote, ils dégagent ». 

 

Nous devons être l’outil clair et utile à cette besogne. L’enjeu n’est pas d’essayer de préserver quelques positions acquises en reprenant les vieilles méthodes du passé (qui ne fonctionnent plus d’ailleurs) mais d’être utile à notre Peuple. Qui prendra la tête du processus en cours ? Qui guidera la colère ? La force humaniste, progressiste, sociale, partageuse, républicaine, écologiste, internationaliste ? Ou la force sombre, nationaliste, ethnicisée, xénophobe, antisociale, égoïste ? Un nouveau cycle politique s’ouvre.

Nous entrons dans la tempête. Il ne faut pas reculer et évoquer le passé. Sentant venir le naufrage, ceux qui veulent abandonner le navire « Solferino » ont encore le temps de le faire. Bienvenu à bord les amis.  Mais, s’ils ne veulent pas, ou s’ils hésitent encore, qu’ils ne nous demandent pas de fournir la bouée, ou le tuba et les palmes, et de nous arrimer à eux. Quand la vague est haute, ni radeau, ni pédalo ne tiennent la mer bien longtemps… Seul, un équipage déterminé et discipliné, agissant en cadence, aucunement encombré de poids mort inutile, suivant une feuille de route claire, ayant la même destination, est à même d’avancer loin et jusqu’à bon port.

Et rappelons-nous : il n’est pas de bon vent pour le marin qui ne sait pas où aller.