Grandes et petites manœuvres…

Continuons d’exiger le retrait de la loi El Khomri

Le gouvernement a commencé à reculer à propos de quelques points sur la loi El Khomri, mais il a maintenu dans sa nouvelle mouture des mesures dangereuses pour les salariés et extrêmement réactionnaires. Bien des commentaires plus pertinents que les lignes qui suivront ont déjà été écrits. Nous sommes nombreux à le dire, et aussi dans les Confédérations syndicales CGT et FO : la cohérence d’ensemble, même plus light, reste hélas la même. La seule suppression réelle concerne le temps de travail des apprentis qui restera comme précédemment.  Sur le plafonnement des indemnités prud’homales, qui est transformé en « barème indicatif » (mais qui laisse à craindre des harmonisations vers le bas), la reculade est modeste. Le texte reste surtout un dispositif au profit des grandes entreprise et n’offre rien aux PME et TPE qui souffrent beaucoup des banques qui ne les aident guère.

Concernant les licenciements les critères vont être assouplis et les accords collectifs pourront déroger au code du travail en défaveur des salariés. La précarisation des jeunes va s’aggraver. Pierre Gattaz, président du Medef, a applaudi et s’est montré satisfait que « la sécurisation des licenciements soit maintenu ». Mais la révolution copernicienne du droit du travail est maintenue. La nouvelle version de loi EL Khomri maintient la logique d’un bouleversement radical du modèle social français : avec elle le code du travail n’a plus pour rôle de protéger les salariés et la hiérarchie normes sont inversées. Malgré les affirmations maintenues du premier ministre, le nouveau n’a pas pour objectif de diminuer le chômage. Tout à l’inverse, il utilise la menace que constitue le chômage de masse pour imposer aux salariés une baisse historique de leurs droits, dans le seul but d’augmenter les profits des entreprises. Il est donc nécessaire de continuer à nous mobiliser pour obtenir le retrait total de ce projet de loi. Et, force est de constater une réelle peur du gouvernement devant la mobilisation. La lutte paye, ne désarmons pas. C’est pourquoi il faut manifester notamment les 17, 24 et 31 mars. Tous dans la rue !

La phraséologie orwelienne du gouvernement

Bien sûr, dans ce bras de fer, le gouvernement actuel pratique l’enfumage et dispose de puissants outils pour le faire. Dans la guerre qu’il mène contre des acquis sociaux si chèrement obtenus, Manuel Valls se fait élève du stratège chinois Sun Tzu « Tout l’art de la guerre est basé sur la duperie. » Aidés de quelques communicants peu scrupuleux, relayés complaisamment dans des médias, la propagande se répand en utilisant une nov-langue digne du roman 1984 de Georges Orwell. En voici quelques exemples que je caricature à peine : « faciliter les licenciements, c’est faciliter l’embauche », « Supprimer des droits c’est en bâtir de nouveaux », « le progrès c’est le recul des droits » « l’enrichissement de quelques-uns fait le bonheur de tous », « Le chômage, c’est la faute des droits des salariés » etc… Dans ce monde absurde, les mots, et les idées qui vont avec, n’ont plus de sens. Les contre-réformes qui détruisent des décennies de droits sociaux deviennent soudainement des « réformes » qu’il faut applaudir séance tenante. Accepter que l’on vous licencie illégalement en baissant vos indemnités c’est être « moderne, souple, flexible » … S’y opposer c’est être « ringard, rigide, passéiste » … Ce pays serait donc « bloqué » alors que le Medef et le gouvernement voudrait le « mouvement » … Et bien sûr, c’est au nom de la jeunesse et des chômeurs que l’on veut affaiblir le code du travail qui n’est défendu que par des « privilégiés » ! Les syndicats sont des « dinosaures » alors qu’évidemment chacun doit scander qu’il « aime l’entreprise » … ce qui revient à dire « Patrons, je vous aime » ! Eux sont courageux, entreprenants, visionnaires, modernes, désintéressés, et leur sort est plus à plaindre que ceux des salariés, etc… Tous ceux qui veulent une autre répartition des richesses sont des has-been dont l’idéal est la Corée du Nord ! Ou Cuba, si vous avez affaire à un caricaturiste à la main plus légère….

Ils reculent… continuons d’avancer

Dans cette cohue idéologique où toute la longue histoire du mouvement ouvrier pour obtenir des droits et des protections se fait insulter par des « créatures » qu’il est de bon ton d’admirer tellement ils sont beaux sur les couvertures glacées des magazines, la grande majorité de notre peuple et notre jeunesse répondent : pas d’accord ! C’est une bonne nouvelle ! Dégustons là avec émotion. Parler de « la » question sociale à nouveau et s’exprimer sur l’intérêt général et le degré de civilisation que l’on veut atteindre. On est loin des débats nauséabonds sur la religion des uns et des autres et la supposé non-possibilité d’untel ou untel de faire peuple à égalité avec tous les citoyens. La conclusion de cette première séquence de mars est claire : puisque le gouvernement et ses funestes projets reculent, avançons ! La lutte élève les consciences. Et faut-il le répéter, ceux qui s’opposent à la loi El Khomri en exigeant son retrait veulent du changement, des réformes, le progrès… la France qui bouge c’est eux. Mais pas dupes ils savent apprécier de la réalité des choses et ne confondent pas les coups de poings et les caresses.

Quand « Dany » rime tristement avec calomnies

Dans ce bras de fer, parmi les duperies mises en œuvre par le gouvernement et ses satellites, il y a la calomnie des opposants. Il faut salir, coûte que coûte, ceux vers qui pourrait converger la colère. La rhétorique des oligarques semble être dans les moments de tensions : nous sommes dégoutants, certes, mais nous le sommes tous, sans distinction, y compris ceux qui nous critiquent. C’est la stratégie du dégoût généralisé…. J’en ai déjà parlé lors du précédent billet. Les quelques jeunes dont les visages émergent dans la mobilisation en sont généralement les premières victimes. Les syndicats aussi. Ceux qui acceptent les reculs sont « réformistes », ceux qui les refusent sont des « radicaux ». Classique. Quand j’évoque les syndicats qui prêtent la main au gouvernement, exclusivement pour des raisons politiciennes, je pense bien sûr aux directions confédérales, car à la base dans les entreprises, les courageux travailleurs qui sont syndicalistes résistent, quel que soit le nom de leur organisation. Je reviens à la calomnie du jour. Elle concerne cette fois-ci mon ami Jean-Luc Mélenchon qui se voit agressé par l’impayable Daniel Cohn-Bendit qui au micro de RMC décrit Jean-Luc comme un type qui ne fait rien au Parlement européen. Est-il actif lui demande-t-on ? : « Rien du tout (..) il prend le fric et il se taille. » A vomir. Oui, à vomir car M. Cohn Bendit a le droit d’être en désaccord avec Mélenchon, mais pas de le calomnier ainsi par le mensonge. Quel français est capable de citer plus de cinq ou six noms de parlementaires européens ? Bien peu. Parmi cette masse de députés anonymes combien sont des eurobéats inutiles, mais sans doute très « actifs » selon les critères de M. Cohn-Bendit, c’est à dire ceux de la bureaucratie bruxelloise… Un petit rapport par ci, une petite allocution par-là, bien sage, et puis après « coucouche panier ». Bon, je répète, notre Dany le rouge (de honte) a le droit de nous reprocher notre critique sans concessions du naufrage de l’Europe libérale, mais il n’a pas le droit de décrire Mélenchon comme un « inactif » qui ne ferait que jouir de quelques avantages matériels. La médiocrité de l’attaque est à la dimension de son auteur. Voilà bientôt 50 ans ( !) que Daniel Cohn-Bendit raconte tout et n’importe quoi et il continue de parader sans que nul ne lui en tienne rigueur. Cet homme a kidnappé mai 68 dans notre imaginaire collectif, grande grève générale ouvrière, en faisant croire qu’il en été le porte-parole. Baliverne. Il en fut la caricature utile au système. Pour lui, les syndicats étaient des « bordels » et les élections des « pièges à cons » … Ce qui fit l’affaire du pouvoir gaulliste qui ne rêvait que d’un tel épouvantail. Aujourd’hui, il est devenu un centriste, pro-européen aveuglé refusant de voir le désastre, plus proche de François Bayrou et d’Alain Juppé (dont il pense qu’il va « calmer la France ») que ce que représente Jean-Luc Mélenchon et tous ceux qui se définissent comme des insoumis. Vous voulez un exemple récent ? La seule critique qu’il est capable d’émettre contre la loi EL Khomri est un problème de méthode : « Le gouvernement a tout faux. Cette réforme du Code du travail vient trop tard dans le quinquennat. Si malgré tout, il la voulait, il aurait dû mettre sur la table des proposions préalablement négociées avec la CFDT, syndicat réformiste, et discutées avec les jeunes. Bref il lui fallait préparer le terrain. Aujourd’hui, tout se fait dans l’urgence, ce qui démontre la faiblesse de l’exécutif en matière de bonne gouvernance. » Bref, si Valls et Hollande ont des problèmes, c’est qu’ils sont maladroits et non en raison de leur politique. Fondamentalement, Daniel Cohn-Bendit se définit comme un libéral-libertaire. C’est à dire la précarité pour tous, mais un pétard à la main, évidemment. Nous voulons une 6e République, fruit d’une Assemblée constituante, qui briserait le pouvoir de l’oligarchie actuelle. Lui, propose seulement de « constitutionnaliser » dans la Ve République le principe de la primaire.

Macron à la place de Hollande… et si tu arrêtais tes conneries ?

L’emphase du bonhomme masque l’ineptie de ses minuscules propositions. Il critique désormais François Hollande, mais vante haut les mérites d’Emmanuel Macron. Ne dit-il pas Paris Match :« Le plus intelligent, c’est Macron. » ? Allez chercher une cohérence à tout cela. Son problème avec le gouvernement actuel, c’est le style mais pas la politique économie et sociale. Et ses rêves de primaires de « toute la gauche », qui bien sûr selon lui ne doivent faire émerger qu’un candidat pro-UE, ne sont là que pour permettre à la caste actuellement au pouvoir de se maintenir. A ceux qui veulent un changement de politique, il propose le jeu des chaises musicales du type Macron à la place de Hollande. La belle affaire ! De ce point de vue, il est un escroc qui fait les poches de bonnes volontés qui cherchent une issue à la situation actuelle. Le clown est là pour faire rire le public, mais à la fin, c’est la tarte à la crème dans le visage de chacun et le coup de pied au derrière, pour laisser la piste aux fauves. « Et si on arrêtait les conneries ? » vient-il de publier chez Fayard avec le journaliste Hervé Algarrondo. On ne saurait mieux dire de son parcours…. Manifestement, il n’a pas envie d’arrêter.

Rendre des comptes au peuple… et à lui seul

Mais allons plus loin sur cette affaire du Parlement européen. La vérité ? Jean Luc Mélenchon est présent lors de 91 % des votes en séance plénière, ce qui fait de lui un des députés les plus assidus. Il a publié sur son blog près de 537 explications de votes ! Qui dit mieux ? Par ailleurs, pour en savoir plus, mon jeune ami Antoine Léaument a déjà bien répondu sur son blog. Mélenchon circule dans toute la France pour faire connaître la réalité de ce qu’il se passe au parlement européen. Il a publié de nombreux ouvrages à ce sujet…  Il fut le premier à dénoncer ce qui se préparait avec le Traité dit TAFTA en 2009, alors que personne ne l’évoquait (à commencer par M. Cohn-Bendit qui fut très discret sur ce Traité aujourd’hui comme hier). Et puis finalement, qu’est-ce qu’un député en réalité ? C’est un « délégué » du peuple, élu par lui. C’est à lui seul qu’il a des comptes à rendre. Et le moins qu’on puisse dire est que Jean-Luc Mélenchon est un homme utile (même si l’on est contre nos idées) au débat public par ses prises de position et ses actes. Bref, utile au Peuple. Daniel Cohn-Bendit rêve peut être d’un Mélenchon « enfermé » à Bruxelles dans des réunions ineptes, où il perdrait son temps et son énergie. Fort heureusement, ce n’est pas ainsi que les choses se passent. Je devine que M. Cohn-Bendit apprécie peu de voir Jean-Luc chaudement accueillis dans les manifestations de salariés ou de lycéens tel que l’atteste la petite vidéo qui termine ce billet. C’est sûr que cela exige un peu plus de combativité que de commenter des matchs de foot pour je ne sais quelle chaine de TV où déclamer des éditos enfilant les poncifs (payer sans doute, mais combien au fait ? Et si Dany nous parlait de son « fric » ?) au micro d’Europe 1. Quel personnage politique a d’ailleurs droit à une chronique de 3 minutes tous les matins sur une grande radio ? Aucun. 

Le sens d’une vie humaine…

Je termine sur une touche personnelle. Le Jean-Luc que je connais depuis près de 20 ans est un homme qui brûle sa vie intime dans le combat politique. La vie de Jean-Luc qui « prendrait le fric et se casserait  » ? Parlons en… Un jour ici, un autre ailleurs, une réunion à préparer, une émission, un discours, un livre, etc… Toute son existence n’est qu’engagement sans concessions, actions tendues vers le collectif, réflexions pour combattre les inégalités… Bien sûr, il a le cuir solide et connaît les règles de cette lutte. Et je devrai me réjouir que notre site JLM2017.fr ne cesse de voir de plus en plus « d’insoumis » le rejoindre. Déjà 75 000 ! Mais, personnellement cela m’affecte de le voir ainsi calomnié. Il va de soi qu’il ne demande aucun apitoiement sur lui-même. Je sais qu’il connaît la rudesse de l’existence pour des millions de nos concitoyens. Mais, j’ai la conviction qu’il veut être jugé sur ce qui aura été le cœur de son existence : la lutte acharnée pour changer le monde et le construire meilleur, demain pour les prochaines générations. Je le vois comme le maillon d’une longue chaine. Pour cela, il aura su dire « Non » quand cela le nécessitait. Le confort médiatique dans laquelle Cohn-Bendit, au nom de quelques mois d’une rébellion de jeunesse, aura finalement logé la sienne n’a à l’inverse rien d’exemplaire pour demain. Mais, son pouvoir de nuisance n’est pas négligeable. Pour Jean-Luc Mélenchon des heures de travail et de pédagogie politique peuvent ainsi être détruites par une rumeur lancée par un médiocre et relayé par des fainéants. Tel est le triste sort de ceux qui ont l’honneur d’incarner des idées. Baisser la garde une seconde, et l’épée de l’adversaire viendra se glisser dans vos chairs… et Cohn-Bendit n’est plus que l’incarnation d’un homme qui fut, mais qui n’est plus, dont la seule révolte est de ne jamais mettre de cravate et de rester ébouriffé, un souvenir de rêve de Révolution échouée, mis au service d’une pensée rance, conformiste et… soumise.